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d’oubli; elle pensera seulement, et non sans raison, que l’oubli non intentionnel est un indice presque aussi sûr d’un certain non-vouloir qu’un prétexte conscient.

De même, dans la vie militaire on n’admet aucune différence de principe entre une négligence par oubli et une négligence intentionnelle. Le soldat doit ne rien oublier de ce qu’exige de lui le service militaire. Si, cependant, il se rend coupable d’un oubli, alors qu’il sait très bien ce qui est exigé, c’est qu’il existe chez lui des motifs qui s’opposent à ceux qui doivent l’inciter à l’accomplissement des exigences militaires. Le soldat d’un an qui voudrait s’excuser au rapport, en disant qu’il a oublié d’astiquer ses boutons, serait sûr d’encourir une punition. Punition qu’on peut considérer comme insignifiante, si l’on songe à celle qu’il encourrait s’il s’avouait à lui-même et s’il avouait à ses supérieurs que toutes ces chinoiseries du service lui répugnent. C’est pour s’épargner cette punition plus sévère, c’est pour des raisons pour ainsi dire économiques qu’il se sert de l’oubli comme d’une excuse, à moins que l’oubli ne soit réel et ne vienne s’offrir à titre de compromis.

Les femmes, comme les autorités militaires, prétendent que tout ce qui se rattache à elles doit être soustrait à l’oubli et professent ainsi l’opinion que l’oubli n’est permis que dans les choses sans importance, tandis que dans les choses importantes il est une preuve qu’on veut traiter ces choses comme insignifiantes, c’est-à-dire leur refuser toute valeur 66. Il est certain que le point de vue de l’appréciation psychique ne peut pas être totalement écarté dans