l’accumulation d’une épargne leur permettant de finir leurs jours en Suisse. On se bornera ici à mentionner quelques motifs qui semblent avoir incité des émigrés glaronais à revenir au pays avant la Première Guerre mondiale. En premier lieu, les changements induits dans la constellation familiale: la perte d’un conjoint est parfois l’une des raisons du retour, à plus forte raison lorsque les enfants mariés sont décédés au lieu d’expatriation. Pour les veufs, toutefois, le décès d’une épouse signifie parfois le retour temporaire, surtout à la fin du XIXe siècle, pour s’y remarier. L’inadaptation au pays d’accueil (le Heimweh) a été parfois aussi un motif de retour, mais lié souvent à l’âge auquel s’est faite l’émigration. Les questions de santé (tuberculose) ont provoqué certains retours, les possibilités de rétablissement étant plus appropriées en Suisse.
Jusqu’au début du XIXe siècle, l’engagement au service étranger a été la forme la plus visible de l’émigration temporaire de la population masculine sans qualification. D’une génération d’hommes survivant à 16 ans, la proportion de jeunes gens recrutés pour le service étranger fluctuait entre 10 et 25 pour cent aux XVIIe et XVIIIe siècles suivant les régions et suivant les périodes. Trois facteurs influençaient la proportion de retours: la mortalité liée aux conflits armés et aux épidémies, le degré d’endettement des soldats puisque seule l’absence de dettes envers le capitaine de la Compagnie permettait, en principe, d’obtenir son congé de l’armée, et la puissance étrangère qui avait recruté. L’endettement était l’arme principale du capitaine pour «fidéliser» le soldat dans sa compagnie et l’empêcher d’obtenir son congé, d’où une proportion importante de soldats ayant de longues durées de service, d’où aussi le fort taux de désertions qui ne s’accompagnent pas d’un retour au pays. Par ailleurs, les chances d’ascension sociale plus grande des anciens soldats, au service de Hollande par exemple, ont fortement réduit les velléités de retour en Suisse, déjà à la fin du XVIIe siècle. Pour la France, en revanche, les contemporains évaluent la proportion des soldats rentrés au pays à 30-40 pour cent des effectifs engagés au milieu du XVIIIe siècle, proportions sans doute trop optimistes si l’on tient compte de la mortalité. Mais sans doute aucun, le bilan du service étranger pour le soldat rentré au pays était souvent défavorable, au contraire du bilan des officiers et des familles possédant les compagnies et les régiments. Aux difficultés de réinsertion dans le monde rural du fait de l’adoption d’un mode de vie différent, de l’absence d’économies, voire de l’endettement de certains, de leurs blessures et de leurs infirmités s’ajoutait le fait que, sauf rares exceptions, les compétences acquises au service étranger n’étaient que peu demandées en Suisse et que les causes économiques ayant