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à l’instar de la société qui les génère.[6] À partir de ces décennies, les migrations et les retours entrent à notre sens dans un autre registre. La mutation des sociétés alpines, sous l’effet du tourisme de masse et plus récemment encore du tournant écologique et de l’engouement pour la montagne et les espaces protégés, offrent aux habitants originaires la possibilité de rester ou de revenir pour participer aux activités économiques.

Cela permet également à d’autres catégories d’habitants sans lien originaire avec les vallées de s’y installer pour profiter de ce nouveau contexte économique. Toutes ces questions et bien d’autres démontrent que ce thème des migrations de retour n’en est qu’à ses débuts. On tient là un sujet qui, parce qu’il pose de nombreuses questions, en est d’autant plus passionnant, même s’il n’est ni facile à aborder ni à cerner. Il est vrai que pour le monde alpin en particulier, nous ne disposons que d’informations éparses, saisies au fil des correspondances entre les migrants et leurs familles.[7] Les sources classiques sont en général peu mobilisables et peu convaincantes. La saisie des retours s’avère encore plus périlleuse que celle des départs. Ce sont surtout les témoignages oraux, les récits des migrants ou de leurs descendants, qui permettent d’appréhender cesparcours dans leur globalité, du départ au retour, dans une lecture descriptive et argumentative de ces destinées. Plus encore ils intègrent l’imaginaire des migrations et des destinations, ainsi que celui réalisé ou fantasmé des motifs de ces mouvements.[8] Au final ils permettent d’approcher un phénomène moins minoritaire que l’on dit habituellement.

Les traces des retours sont en effet multiples dans les régions où les départs étaient nombreux et réitérés dans le temps. Elles touchent d’ailleurs divers domaines de l’histoire et de la vie communautaire des régions alpines. Elles se concrétisent, par exemple, dans de nombreux villages par des habitations réalisées grâce aux fortunes cumulées par d’anciens migrants. Reproduisant les modèles architecturaux urbains ou observés sur les lieux du séjour ou les territoires traversés,[9] ces nouveaux habitats offrent un décalage avec les maisons-fermes classiques qui n’est pas seulement visuel. En sus d’être peu adaptés aux conditions climatiques, surtout hivernales, ils traduisent une autre manière d’habiter et d’autres modes de vie. La vie matérielle et culturelle offre d’autres types de traces: sur le plan linguistique, les langues locales subsistent à côté de celles des régions fréquentées par les migrants. Progressivement elles sont vues comme un stigmate de l’archaïsme et se modifient avec l’insertion de termes ou de formes grammaticales importées. Les modèles vestimentaires ou alimentaires introduits depuis les terres d’émigration, ou encore les nombreuses initiatives de

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Histoire des Alpes - Storia delle Alpi - Geschichte der Alpen 2009/14